On se dirige droit vers une escalade verbale. Après les « dérives » de l'Eglise Catholique dénoncées par Félix Tshisekedi, Mgr Donatien Nshole a réagi pour lui rappeler la mission sociale de l'Eglise.
Comme pendant la fin du dernier quinquennat de Joseph Kabila, l'Eglise catholique a toujours joué un rôle en contrepoids à l'approche des élections. Après avoir longtemps espéré du pouvoir de Félix Tshisekedi, les évêques catholiques durcissent le ton en 2023. Dans leur dernier message, ils dénoncent un recul dans le pouvoir de Tshisekedi caractérisé par « la répression violente des manifestations de l'opposition, la restriction de la liberté de mouvement des opposants, des tentatives des projets de lois discriminatoires, l'instrumentalisation de la justice et les arrestations arbitraires ».
Alors qu'il a manifesté sa volonté de briguer un second mandat, Félix Tshisekedi voit dans les yeux de ses anciens alliés, une voix plus que dissonante. Pire, parmi les soutiens de Félix Tshisekedi, l'Eglise catholique est aujourd'hui attachée à un autre candidat. La sortie musclée du chef de l'Etat à Mbuji-Mayi visait ce parti pris pas assumé. En s'adressant au président de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) Mgr Marcel Utembi, Félix Tshisekedi a parlé « d'une dérive dangereuse (au sein de l'Eglise) surtout en cette période électorale ». Cela illustre le climat glacial qui s'installe entre le pouvoir en place et le Chef de l'Etat. Et quand la question de la période électorale est évoquée, il y a urgence: le chef de l'Etat ne veut pas perdre l'électorat catholique. Tant bien même les consignes de vote ne rentrent pas dans les prérogatives des évêques, leur prise de position peut influencer une partie de l'électorat.
Prise de position du Cardinal
S'il y a un prélat catholique qui n'est plus en odeur de sainteté avec l'entourage du président Tshisekedi, c'est bel et bien l'archevêque de Kinshasa, le cardinal Fridolin Ambongo. On voit en lui, l'image des positions extrémistes contre le régime de Kinshasa. Selon certaines sources de la majorité, la pique du chef de l'Etat à Mbuji-Mayi, lui était personnellement adressée.
Pour ceux qui soutiennent le président de la République, le cardinal Fridolin Ambongo jouerait le jeu du candidat déclaré Moïse Katumbi. Il a loué « sa foi catholique qui compte beaucoup ». Il a été invité avec d'autres Evêques dans le village d'origine du candidat. Tout ceci mis ensemble donne le magma d'accusations contre lui.
Parmi ses critiques les plus acerbes concernant le processus électoral, Ambongo s'en était pris violemment en avril dernier au projet de loi Tshiani. « Nos députés nationaux comme des apprentis sorciers, commencent à s'entraîner à la congolité », avait -il pesté dans son homélie. Ce projet déposé à l'Assemblée Nationale n'a pas été débattu dans la session de Mars et pourrait l'être au mois de septembre. Son initiateur, l'économiste Noël Tshiani, préconise que seuls les Congolais nés des parents congolais d'origine peuvent accéder au poste de président de la République. S'il est adopté, Moïse Katumbi sera empêché de se présenter. Celui-ci est considéré comme le challenger redoutable de Tshisekedi.
Force du progrès qui inquiète les Evêques
Si les critiques sur le processus électoral et la loi Tshiani ont été de plus en plus évoquées, une autre affaire ne laisse pas les évêques taiseux. La Brigade Spéciale de l'UDPS (parti du président), Force du progrès (BSU) opère comme « une milice visiblement entretenue, qui collabore parfois avec la police pour traquer les adversaires politiques ». Les évêques l'ont dénoncé dans leur dernier message.
Aucune enquête n'a été diligentée jusqu'à présent pour démanteler ce réseau. Les évêques restent convaincus que cette milice a de soutiens au sein du parti au pouvoir.
Dans ce contexte, la causerie politique prévue ce mardi 27 juin par le Secrétaire Général de l'UDPS, Augustin Kabuya sera sûrement une réponse aux Évêques. A l'approche des élections, la casquette de l'Eglise est encore interprétée selon qu'on se trouve dans un camp politique déterminé.