Alors que la table ronde sur l'état de siège s'ouvre ce lundi 14 août à Kinshasa, l'ancien président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) en costume d'opposant depuis quelques mois, a dressé dimanche 13 août, toute une liste d'échecs “patents” de l'état de siège instauré par le chef de l'Etat depuis mai 2021.
Corneille Naanga s'illustre depuis un moment en donneur des leçons et contrôleur de l'action publique. C'est en cette qualité qu'il peint un tableau sombre de cette mesure exceptionnelle instaurée dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri, alors que les autorités militaires parlent des avancées significatives enregistrées.
Corneille Naanga n’entend pas de cette oreille, les prouesses tant vantées par les autorités militaires de ces deux provinces dans le rétablissement de la paix et l'éradication des groupes armés. Pour lui, les prémisses ont été déjà fausses.
«Proclamé dans la précipitation, instauré unilatéralement, et dans l'irrévérence constitutionnelle sous prétexte de restaurer la paix par l'éradication des groupes armés... L'état de siège aura été un chapitre malheureux de la stratégie de l'ennemi naïvement endossée par notre gouvernement», déplore l'ancien patron de la centrale électorale.
Le président du parti politique Action pour la Dignité du Congo et de son Peuple (ADCP), est dans le lot de ceux qui pensent que l'état de siège «a fragilisé les piliers de la souveraineté de l'Etat et accentué la criminalité dans les provinces militarisées à dessein et nullement au bénéfice de la République. Au contraire, ce totalitarisme par une administration militaire de l'état de siège, a davantage endeuillé la région (Nord-Kivu et Ituri) plutôt que de l'épargner des affres de guerre». Pour preuve, Corneille Naanga brandit la résurgence des rebelles du M23.
«C'est sous le régime de l'état de siège que le M23 a attaqué Bunagana et conquis des pans entiers du territoire national, pendant que le CODECO a, de son côté, gagné plus d'épaisseur dans la criminalité sauvage», a-t-il décrié.
Deux ans de l'état de siège, le bilan est sanglant d'après Corneille Naanga: «Plus de morts ! Plus de restrictions de l'espace politique et économique. Bunia, Béni, Butembo, Saké et Goma asphyxiés. Un nombre exponentiel de déplacés des guerres abandonnés à eux-mêmes et les forces négatives ont repris du poil de la bête devenant des alliés objectifs de principaux belligérants», a-t-il enfoncé.
C'est avec des mots forts et dignes d'un opposant radical que l'ancien patron de la centrale électorale a sévèrement critiqué l'état de siège, tout en donnant quelques pistes de solutions. Corneille Naanga qualifie la table ronde convoquée à Kinshasa d'une comédie orchestrée par le Premier ministre Sama Lukonde.
«La table ronde est un banquet, un festin offert aux victimes, un camouflet des politiques sécuritaires à tâtons et irrationnel sous-traité à des armés étrangères. Un verre de joie qu'offre aux victimes, comme pour assécher les larmes encore chaudes à leurs visages», estime-t-il.
Toutefois, Corneille Naanga demande la tête du gouvernement Sama Lukonde 2 et exige en même temps, la réinstallation des administrations civiles régulières issues des élections qu'il a organisées en décembre 2018.