La récente interview du chef de l'État Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo accordée à sa porte-parole Tina Salama, laisse une tâche d'huile sur le tissu social des Congolais. Les populations de l'Est de la République Démocratique du Congo où sévissent depuis plus de deux décennies des massacres à répétition, se sentent arnaquer par le chef de l'Etat. Alors opposant, Félix Tshisekedi avait promis d'installer son quartier général à l'Est du pays pour restaurer la paix.
Revêtu ce jour de la posture de commandant suprême, le président de la république a laissé entendre au cours de cet entretien qu' «il y a toujours une perception que vous avez lorsque vous aspirez à une fonction... A l'époque lors de la campagne, je me suis dis je viendrai, mais lorsque j'accède aux fonctions, je me rends compte en tant que commandant suprême des forces armées de notre république. Je n'ai pas besoin d'aller m'installer là-bas pour que les choses marchent».
Face à ce qui paraît comme un revirement à 180°, les notables du Nord-Kivu apaisent les tensions. L'un d'eux, maître Achille Kapanga reconnaît toutefois, que «le chef de l'État a plusieurs charges de la nation», mais il estime que son installation à l'Est du pays jouerait beaucoup plus sur la recherche de la paix.
«Par rapport au second point, effectivement le chef de l'État avait prononcé maintes reprises, il avait dit à Bukavu comme quoi il se sentirait jamais président aussi longtemps que la paix ne serait restaurée à L'Est. Il avait même dit ça aux enfants de Béni qu'il allait s'installer à Béni où on pouvait avoir l'état-major et il avait même dit à Goma que c'était vraiment son souci de venir s'installer au Nord-Kivu pour suivre de près la situation et remettre un peu de l'ordre, au besoin d'imposer la sécurité curieusement pendant tout ce temps, rien n'a pas été fait.», a-t-il regretté.
Cet ancien maire de la ville de Béni au Nord-Kivu, appuie son argumentaire par la qualité des rapports produits sur terrain. Il brandit à ce effet, l'imbroglio autour de l'effectif militaire déployé au front pour combattre les ennemis de la paix.
«Voilà pourquoi nous pensons que quand il est sur terrain il a la facilité de recevoir différentes délégations qui vivent sur le lieu, qui ont des réalités sur terrain... C'est comme la fameuse question de 21.000 militaires mais quand il est arrivé à Béni il a été surpris de constater que les 21.000 militaires dont on lui parlait, n'existait pas.», estime Achille Kapanga qui demande par ailleurs, au chef de l'Etat de «sacrifier une semaine sur terrain en train de suivre la situation et encourager les troupes».
Ce candidat déclaré aux législatives nationales ne doute pas du commandement militaire à distance, mais soutient que «sa présence sur terrain est différente des commandements qu'il peut mener à partir de Kinshasa. "Vous savez quand on est sur place on sait suivre de près la situation, aussi analyser et encourager les troupes mais quand on est à distance ce n'est pas bon.", a renchéri Achille Kapanga.
Miné par des groupes armés locaux qu'étrangers, l'Est de la République Démocratique du Congo subit de plein fouet, les massacres à répétition depuis plus de 20ans. Les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri payent le lourd tribut. Des millions de Congolais ont laissé leurs peaux sous l'oeil impuissant des autorités d'alors. Ceci malgré la présence de la mission onusienne et ce jour, des contingents régionaux notamment de la Communauté des États de l'Afrique de l'Est (EAC).
L'espoir de voir le chef de l'État installer son état-major à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu pour restaurer la paix, s'envole de plus en plus.