Dans une interview exclusive accordée le mardi 12 juillet 2022 à Radio France Internationale, Pierre Boisselet coordonnateur d’Ebuteli (Institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence) a déclaré que le gouvernement congolais est pour l'instant en difficulté pour accepter de négocier avec le groupe terroriste rwandais du M23, qui est un véritable repoussoir au sein de l'opinion publique congolaise.
«On voit qu’effectivement sur le terrain strictement militaire, le gouvernement congolais est pour l’instant en difficulté, mais je pense que pour des raisons politiques en fait il lui serait très difficile d’accepter de négocier avec le M23 qui est un véritable repoussoir au sein de l’opinion publique congolaise.», a déclaré le coordonnateur d'Ebuteli.
Après une rencontre entre les Présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame, la semaine dernière en Angola, le chercheur Pierre Boisselet estime qu'il y a une vision différente de la crise qui oppose les deux pays.
«Je pense que ça reflète une vision différente de la crise qui oppose les deux pays. Pour le gouvernement rwandais, le M23 est une rébellion congolaise et donc le seul moyen pour résoudre ce problème c’est que le gouvernement congolais négocie avec le M23. De l’autre côté le gouvernement congolais estime que le M23 n’est rien d’autre qu’une agression du Rwanda, et donc pour le Congo la priorité c’était que le Rwanda admette son rôle dans cette crise. Il y a aussi une perception différente du rôle que jouent les FDLR, la rébellion rwandaise présente dans l’Est du Congo, du côté du Rwanda on considère que c’est toujours une menace existentielle alors que côté congolais on convient que c’est un groupe armé dangereux, certes, mais qui semble être moins urgent à traiter que le M23.», a expliqué Pierre Boisselet
Et de poursuivre : «Donc on a ces deux visions, je dirais assez irréconciliables de la crise pour l’instant, et on ne sait même pas finalement ce qui précisément a été signé et convenu à Luanda à ce stade. C’est possible en fait que les discussions aient été engagées, mais qu’il n’y ait pas encore eu de conclusion véritablement.»
Pour Pierre Boisselet le M23 a eu un comportement qui est plus proche d’une armée étatique qui dispose d’une grande puissance de feu notamment.
«Je dirais qu’à la fois les FARDC et la Monusco ont des défaillances structurelles qui sont assez bien connues. Ceci dit, c’est vrai, c’est assez notable que le M23 a un comportement assez différent de la plupart des autres groupes armés dans l’est de la RDC. Lorsqu’il y a eu une offensive de l’armée congolaise, ces groupes-là ont plutôt tendance à fuir alors que le M23 visiblement conquiert des positions, les maintient, et donc il a eu un comportement qui est plus proche d’une armée étatique et qui suppose une grande puissance de feu notamment.», a ajouté Pierre Boisselet.
Lors du sommet tenu le 6 juillet 2022 à Luanda entre les présidents Rwandais, Paul Kagame, et Congolais, Félix Tshisekedi, un cessez-le-feu a été décidé ainsi que le retrait du M23 du territoire congolais.
Raphaël Kwazi